Une ville natale

Lumière Classics : 2. Trésors et curiosités

Do-seong (Min Yu), un orphelin confié à un temple bouddhiste, s'attache à une jeune veuve (Choi Eun-hie)qui vient y pleurer la mort récente de son fils.

Adapté d’une pièce de théâtre à succès de Ham Se-deok, Une ville natale capte le paisible quotidien d’un temple bouddhiste situé dans les montagnes de Corée du Sud. Première réalisation de Yoon Yong-gyu, le film reçut des critiques élogieuses, notamment pour son tout jeune interprète Min Yu, qui porte toute la puissance de ce somptueux mélodrame, chroniquant les espoirs déçus d’un orphelin, attendant désespérément le retour de sa mère. Entremêlant culte maternel et philosophie bouddhiste, Une ville natale est une œuvre bouleversante, surtout si on la replace dans son contexte historique : alors qu’en 1950 la Corée se remet doucement de la Seconde Guerre mondiale, de l’occupation japonaise et de la partition de son territoire en deux zones par les puissances mondiales, la guerre civile éclate.

« La guerre civile, violente et confuse, va faire table rase du passé du cinéma coréen. Durant cette guerre (1950-1953), matériels et cinéastes mobilisés furent utilisés au tournage de films de propagande pour les régimes du Nord comme du Sud. Au Sud, ils sont épaulés par des cinéastes américains, comme John Ford qui tourna sur place le documentaire This Is Korea en 1951. Au Nord, on organise l'enlèvement de cinéastes de renom […] pour les utiliser dans les services de propagande. En règle générale, les documentaires propagandistes et les actualités de guerre monopolisent les écrans au détriment des films de fiction. » (Antoine Coppola, Le Cinéma sud-coréen : du confucianisme à l’avant-garde, L’Harmattan, 1997)

Ainsi, seulement quelques mois après la sortie de ce film paisible, l'invasion de la Corée du Sud par celle du Nord entraîne l'expatriation de nombreux cinéastes, dont Yoon Yong-gyu, qui réalisera plusieurs films pour la propagande nord-coréenne jusqu’en 1980.