Une fable de jadis

Lumière Classics : 2. Trésors et curiosités

Alors qu’elle est amoureuse d’un homme de son village, Marigo (Elvira Diamanti), une jeune femme de 20 ans, est mariée de force à Gjino (Admir Sorra), un garçon de 14 ans, issu d’une famille riche.

Né en Albanie en 1936, Dhimitër Anagnosti est un cinéaste particulièrement prolifique. Il débute sa carrière en 1961 avec le court métrage Njeriu kurrë nuk vdes, mais le public et la critique le découvriront véritablement en 1966 avec son premier long métrage, Le Commissaire de la lumière. Dans ce film, Anagnosti aborde déjà des thèmes forts, tels que l’alphabétisation et l’émancipation des jeunes filles. Durant toute sa carrière, il portera à l’écran les tabous et les problèmes sociaux de son pays, notamment la place des femmes dans la société albanaise – ce qui valut à plusieurs de ses œuvres d’être interdites ou censurées. Les Plaies anciennes (1968) dénonce les préjugés concernant les femmes médecins, Les Vertes Montagnes (1971) évoque l'amputation d'une jeune fille pendant la guerre, La Fille des montagnes (1974) aborde de nouveau l'analphabétisme et les préjugés religieux et Une fable de jadis s'attaque au mariage forcé, ici entre une jeune femme de 20 ans et un garçon de 14 ans.

Adapté d’une pièce comique en quatre actes d’Anton-Zako Çajupi, le film est une critique des mariages arrangés dans les villages des Balkans, tradition contre laquelle l’héroïne va se battre de toutes ses forces. « Alors que le développement industriel en Europe centrale et orientale a conduit à la croissance des villes, dans les Balkans, les villages sont restés le mode prédominant d'organisation communautaire jusqu’à tard dans le XX^e siècle. Les cinéastes des Balkans ont porté une attention constante à la vie des villages, aux traditions, au folklore et aux minorités. Le village est une communauté particulière où les traditions sont entretenues, où le patriarcat est souvent intact, où la réputation est facilement l’objet de ragots mal intentionnés et où le dur labeur agricole est une réalité quotidienne. » (Richard Taylor, Nancy Wood, Julian Graffy et Dina Iordanova, The BFI Companion to Eastern European and Russian Cinema, British Film Institute)