Prison de cristal

Invitée d’honneur : Marisa Paredes

Klaus (Günter Meisner), médecin auteur d’expériences sur des enfants dans les camps de la mort, a trouvé refuge dans l’Espagne franquiste. Un accident le cloue dans un poumon d’acier, sous la surveillance de son épouse Griselda (Marisa Paredes) et de leur fille Rena (Gisela Echevarria). Surgit un jour un jeune homme, Angelo (David Sust), qui se fait passer pour infirmier et prend peu à peu le contrôle de la maison. Dans quel but ?

C’est le premier film, à petit budget, du réalisateur majorquin Agustí Villaronga (1953-2023), inédit en salles en France, tourné après la fin du franquisme, lorsque les censures brimant le cinéma espagnol ont explosé. Oppressant et morbide, ce conte gothique en huis clos est puissamment dérangeant, évoquant aussi bien Portier de nuit de Liliana Cavani que Théorème de Pier Paolo Pasolini. Un intrus au physique et au patronyme d’ange vient rompre un équilibre familial malsain et exhumer des secrets cauchemardesques. Mais le cinéaste, peu connu en France (son deuxième film, El niño de la luna, fut présenté au Festival de Cannes 1989) ne veut pas faire œuvre politique : son territoire est l’horreur pure, dont il maîtrise parfaitement les codes, faisant de Marisa Paredes un personnage que l’on pourrait croiser chez Dario Argento.

« C’est un territoire délicat, mais Villaronga ne fait pas de faux pas. Prison de cristal contient certaines des scènes d'amour les plus bizarres jamais conçues (un volontaire pour du sexe dans un poumon d'acier ?) et la meilleure séquence classique de suspense et de meurtre depuis la disparition d'Hitchcock. Le film est teinté d'un humour macabre, d'une douceur trompeuse et de moments de grand-guignol divertissants ; lorsque le cycle des abus et des meurtres se referme, le ton devient d'une tristesse majestueuse. » (Elliott Stein, The Village Voice, 31 janvier 2006)