Ellie Andrews (Claudette Colbert), une riche héritière, décide d’épouser le magnat de l’aviation King Westley (Jameson Thomas) sans le consentement de son père. Elle s’enfuit et décide de rallier New York incognito. De son côté, son père (Walter Connolly) décide d’offrir une récompense à qui lui donnera des renseignements pour retrouver la jeune fille. Dans le bus, elle fait la connaissance de Peter Warne (Clark Gable), journaliste à scandale.
© United Artists / DR
Des producteurs aux acteurs, personne ne voulait de cette histoire. Il faudra courage et force de conviction à Frank Capra pour réaliser cette comédie de mœurs, considérée comme fondatrice de la screwball comedy. Harry Cohn, patron de la Columbia, ne veut pas d’un film d’autobus, considéré comme un sous-genre – MGM et Universal viennent toutes deux d’en sortir un, sans succès. Les acteurs sollicités refusent le film tour à tour. Après Myrna Loy, Margaret Sullavan, Miriam Hopkins, Loretta Young, Constance Bennett, c’est vers Claudette Colbert que se tourne Capra. Elle accepte du bout des lèvres, à condition que le film se fasse en quatre semaines et que son salaire soit doublé. Elle s’attend à ce que Capra refuse, il accepte. Elle traînera des pieds pendant tout le tournage, proclamant qu’elle tourne le plus mauvais film de sa carrière. Clark Gable, quant à lui, est obligé par la MGM de jouer dans New York-Miami : il a refusé plusieurs rôles à la suite ; tourner pour un petit studio peu prestigieux sera sa punition. Malgré tous ces obstacles, la magie Capra opère. Le cinéaste tire parti des caprices de Claudette Colbert pour alimenter son personnage, et obtient naturel et fougue de part des deux interprètes réticents. Ce qui leur vaudra d’ailleurs le seul Oscar de leur carrière.
Dans cette version moderne de La Mégère apprivoisée, Frank Capra est fidèle à lui-même. La réalisation rythmée et trépidante, les plans courts, donnent au film une cadence endiablée, servant un propos sarcastique : la jeune femme riche et suffisante s’adoucit au contact d’un homme de la middle-class, les railleries laissent place à une idylle, les différences de statut, le chômage, la crise s’effaçant face au rêve américain.
Se jouant des règles du code Hays, qui imposera sa rigueur morale jusqu’à la moitié des années 60, Frank Capra instille au film une dose d’érotisme et de sensualité : Claudette Colbert rendant l’auto-stop bien plus efficace en montrant sa jambe aux automobilistes est devenue une scène mythique. Comme l’est aussi celle du "mur de Jéricho", fameux rideau tendu entre les deux lits de la chambre partagée par cet homme et cette femme non mariés, "faible rempart" face au désir naissant. Le mur finira évidemment par se lézarder, hors champ, laissant de côté puritanisme et différence de classe.
« Comme tous les grands films, New York-Miami est un film humain. Qu’il nous fasse sentir, par le biais de la comédie, ce qui va être l’engagement de tout un pays est une raison de plus d’admirer Frank Capra et son œuvre. » (André Moreau, Télérama, 24 décembre 1997)
New York-Miami (It Happened One Night)
États-Unis, 1934, 1h45, noir et blanc, format 1.37
Réalisation Frank Capra
Assistant réalisation Charles C. Coleman
Scénario Robert Riskin, d’après la nouvelle Night Bus de Samuel Hopkins Adams
Photo Joseph Walker
Musique Louis Silvers
Montage Gene Havlick
Décors Stephen Goosson
Costumes Robert Kalloch
Production Frank Capra, Columbia Pictures
Distributeur Park Circus
Interprètes Clark Gable (Peter), Claudette Colbert (Ellie Andrews), Walter Connolly (Alexander Andrews), Roscoe Karns (Shapeley), Jameson Thomas (King Westley), Alan Hale (Danker), Arthur Hoyt (Zeke), Blanche Friderici (la femme de Zeke), Ward Bond (le chauffeur de bus), Wallis Clark (Lovington)
Sortie aux États-Unis 23 février 1934
Sortie en France 12 septembre 1934
Distributeur Park Circus
Restauration 2K par Sony Pictures.
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