1934. Kansas City est une ville prospère, échappant aux effets de la Grande Dépression, et animée, vibrant au rythme du jazz. Mais un climat de violence règne. Blondie O’Hara (Jennifer Jason Leigh), une jeune télégraphiste, enlève la femme d’un politicien influent (Carolyn Stilton), afin d’obtenir la libération de Johnny (Dermot Mulroney), l’homme qu’elle aime, un petit malfrat tombé dans les griffes de Seldom Seen (Harry Belafonte), grand caïd propriétaire du Hey Hey Club.
Solitude. Le morceau qui conclut Kansas City est aussi le premier souvenir de jazz de Robert Altman : Glendora, la gouvernante noire de la famille, assied le garçon d’une dizaine d’années près de la radio : « Écoute. C’est Duke Ellington. Il n’y a pas mieux au monde. »
Altman replonge dans ses souvenirs. Né à Kansas City en 1925, il traîne dans les clubs de jazz dès son adolescence. Quelques années auparavant, ignorant Grande Dépression et prohibition grâce à une alliance entre les démocrates et la pègre, la ville était en effervescence permanente. C’est dans cette riche période qu’il place l’action de son film, entre film noir et hommage au jazz. Pour rendre compte de l’ambiance de l’époque, il engage une vingtaine des meilleurs musiciens du moment. La musique sera enregistrée en direct. Robert Altman filmera d’ailleurs, avec trois caméras, toutes les jam sessions. Ce matériau donnera naissance au film hybride Jazz'34, entre documentaire mis en scène et montage de rushes.
« Le jazz était l’un des éléments constitutifs du scénario. Kansas City est construit comme un morceau de jazz. Les deux personnages féminins, incarnés par Jennifer Jason Leigh et Miranda Richardson, sont comme deux saxophones ténors qui prennent des solos, des riffs. Les interventions d’Harry Belafonte sont comme celles d’une trompette… Chaque personnage correspondait à un instrument. Jamais dans un film précédent je n’avais utilisé consciemment les personnages et les dialogues en les harmonisant comme le jazz. » (Robert Altman, Jazzman n°36, mai 1998) Le cinéaste entrecroise les récits. Il y a d’abord la relation entre Blondie, femme du peuple qui se rêve en Jean Harlow, et Miranda, femme du monde, flottante, qui échappe à son statut à l’aide de laudanum ; mais également l’histoire de Seldon Seen, chef de clan, gangster raffiné et ordure notoire. Harry Belafonte, connu pour son militantisme, hésite avant d’accepter ce rôle à contre-emploi. Convaincu par Altman, il livre une partition précise, inspirée de personnages réels et de souvenirs familiaux.
« Ces retrouvailles avec la ville de son enfance font de cette œuvre complexe une expérience particulière dans la filmographie d’Altman. Ce mélange de souvenirs personnels et de vérité historique lui permet en outre de brosser, sans manichéisme, le portrait de la communauté noire qu’il devait réaliser il y a quinze ans, avant que De Laurentiis ne lui retire le projet de Ragtime, finalement confié à Milos Forman. Certes, Altman évoque l’attitude paternaliste des Blancs et les petites vexations raciales au détour d’un plan, mais il se plaît surtout à dépeindre une véritable société dont les relations avec les Blancs ne constituent qu’un petit aspect. Dans les scènes de boîte ou lors de l’étage des deux femmes dans la pension d’Addie Parker, il en dit plus sur la question noire que d’autres qui y ont consacrés des films entiers. » (Philippe Rouyer, Positif n°423, mai 1996)
Kansas City
États-Unis, France, 1996, 1h56, couleurs, format 1.85
Réalisation Robert Altman
Scénario Robert Altman, Frank Barhydt
Photo Oliver Stapleton
Musique Karl King, Lester Young, Buster Moten, Harry Barris, Gordon Clifford, William "Count" Basie…
Montage Geraldine Peroni
Décors Stephen Altman
Costumes Dona Granata
Production Robert Altman, CiBy 2000, Sandcastle 5 Productions
Interprètes Jennifer Jason Leigh (Blondie O'Hara), Miranda Richardson (Carolyn Stilton), Harry Belafonte (Seldon Seen), Michael Murphy (Henry Stilton), Dermot Mulroney (Johnny O'Hara), Steve Buscemi (Johnny Flynn)
Présentation au Festival de Cannes 12 mai 1996
Sortie en France 15 mai 1996
Sortie aux États-Unis 16 août 1996
Distributeur MK2
Restauration 4K par MK2 en exclusivité pour le festival Lumière au laboratoire Hiventy.
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